LANGUE FICHE G6 Les Paroles rapportées Cours

Cours Les paroles rapportées
Ponti OkiléléClaude PONTI Okilélé (1993)

Les exemples sont empruntés à L’Homme qui rit (version École des loisirs) de Victor HUGO

1. Comment reproduire le discours d’autrui ?

1.1 Le discours direct
La forme « de base » des paroles rapportées est le discours direct qui, par différents repères grammaticaux, insère les paroles prononcées par des personnages dans le récit.
Les moyens grammaticaux d’introduire le discours direct sont :

une ponctuation spécifique : présence de guillemets au début et à la fin du discours direct, présence de tiret à chaque changement d’interlocuteur
éventuellement une phrase qui indique l’énonciateur et qui peut aussi préciser les conditions de son discours (attitude, ton…). Cette phrase peut être avant le discours :
Il alla à la porte cochère et la heurta, et la poussa, et la secoua frénétiquement, en criant : «Ursus ! Homo !»
Elle peut aussi être après les mots prononcés ou au milieu de ce discours ; dans ce cas, cette phrase devient une proposition incise qui est à l’intérieur des guillemets : Gwynplaine la reçut dans ses bras. «C’est toi, dit-elle.» ou bien «Hélas ! dit Ursus, tu l’as tuée.» ou bien «Qu’est-ce que j’ai ? Dit-elle. J’ai quelque chose. La joie, cela étouffe.»
Cette proposition interrompt l’application des règles de ponctuation (majuscules) qui ne sont appliquées qu’après la fin de l’incise.

Le discours prononcé possède les caractéristiques de l’énoncé ancré dans la situation d’énonciation : Pronoms et déterminants des 1ère et / ou 2e personne renvoyant aux interlocuteurs dans un dialogue, le temps présent représente le moment de l’énonciation, les indications de temps et de lieu, les démonstratifs renvoient à ce qui est désigné lors de la situation d’énonciation :

Gwynplaine la reçut dans ses bras : «C’est moi ! je suis , je te tiens dans mes bras. Je suis vivant. Je suis à toi. Me revoici avec toi.[…] Nous allons en Hollande, nous nous marieronsLes différents types de phrases (affirmer, demander, ordonner) sont possibles dans les paroles directes : déclaratif, interrogatif et injonctif (ainsi que la modalité exclamative, qui exprime des sentiments du locuteur)

1.2 Le discours indirect
Les paroles sont intégrées au récit par le biais de verbes introducteurs (dire… + révéler, supposer, prétendre …) et la transformation des propositions constituant les paroles en propositions subordonnées.

Plusieurs changements sont la conséquence de cette intégration :
– absence de la
ponctuation introductive (: « – – ») introduit le discours direct – changement dans les types de phrases : la phrase interrogative déclarative, la phrase injonctive transforme souvent complément l’énoncé ( Elle dit :«Sortez !» elle lui demanda de sortir.), les aspects exclamatifs ne peuvent pas être conservés.
les personnes sont modifiées en fonction de la prise en charge de l’énonciation, il peut y avoir certaines ambiguïtés :

j’ai dit : «Je viens / Il vient»

j’ai dit que je venais / il venait

tu a dit : «Je viens / tu viens / il vient»

tu as dit que tu venais / je venais / il venait

il a dit : «Je viens / il (3e) vient»

il a dit qu’il venait / il venait (3e personne, dont on parle)

Il a dit : «Ils sont là »

il a dit qu’ils étaient là (si 3e) / que nous (si interlocuteur concerné) étions là »

Il a dit : «Je le remercie»

il a dit qu’il le (si 3e) / te (si interlocuteur) remerciait

Il a dit : «Je vous remercie»

il a dit qu’il les (si 3e) / vous (si interlocuteur) remerciait


les temps sont modifiés quand la principale est au passé (cas d’un récit au passé) pour respecter la concordance des temps

Principale au présent

« Tu as tort.»

Pas de changement

Il affirme que tu as tort.

Principale au passé (dans un récit)

Discours direct au
présent
Il a dit :«Tu as tort.»


Discours direct au
passé composé

Il a dit :«Tu a eu tort.»

Discours direct au futur

Il a dit :«Je partirai.»

Concordance des temps

Subordonnée à
l’imparfait
Il a dit que tu avais tort. = idée de simultanéité des 2 événements

Subordonnée au plus-que-parfait

Il a dit que tu avais eu tort = idée d’antériorité de l’événement mentionné dans les paroles rapportées

Subordonnée au conditionnel présent (futur du passé)
Il a dit qu’il partirait = idée de postériorité de l’événement mentionné

– Les adverbes de lieu et de temps sont aussi modifiés (de l’énoncé ancré à l’énoncé coupé)

Dans le discours direct (énoncé ancré)

aujourd’hui
– hier

– demain →
– lundi, mardi … prochain

– cette semaine

– ici

– là

Dans le discours indirect (énoncé coupé)

ce jour-là
– la veille

– le lendemain

– le lundi, mardi … suivant

– cette semaine-là

– à tel endroit

– à tel endroit

– les adverbes et pronoms interrogatifs sont modifiés

Dans le discours direct (énoncé ancré)
interrogation totale
« Viens-tu?»
interrogation partielle
– « 
Que fais-tu ?»

– « Quand viens-tu ?»

Dans le discours indirect (énoncé coupé)

si Il demande si tu viens.

ce que Il demande ce que tu veux.

quand Il demande quand tu viens.


1.3 Le discours indirect libre

L’introduction de l’énonciateur ne se fait
plus par un verbe introducteur, cependant les deux niveaux d’énonciation subsistent car les paroles rapportées conservent le système verbal de concordance des temps et les indicateurs spatio-temporels du discours indirect. La ponctuation n’est plus celle du discours indirect : les modalités interrogatives et exclamatives sont maintenues. Ces paroles sont amenées par le contexte : un personnage est en train de penser ou d’exprimer quelque chose.
Il méditait. Viendrait-il ?


1.4 Le discours narrativisé
C’est une transformation des paroles prononcées par les personnages en récit d’événements :
Et copiant la voix de Gwynplaine, il chanta avec un ineffable amour la réponse du monstre à l’appel de l’esprit.
Les paroles de la chanson sont connues et il serait sans inétrêt de les reproduire mais surtout ce n’est pas Gwynplaine qui les prononcent mais Ursus pour ne pas affoler Déa. Cette transposition de paroles en récit d’événement convient à plusieurs titres dans ce passage.
Seuls des verbes ou des noms remplacent les paroles prononcées :
Ils se disputèrent. Il gronda toute la nuit. La conversation se plongea longtemps. Ils échangèrent encore quelques mots.

2. Quels sont les différents effets provoqués par le choix des paroles rapportées ?

Types de paroles rapportées

fonctions

effets

2.1 Discours direct

Gwynplaine la reçut dans ses bras : «C’est moi ! je suis là»



Discours direct libre

Qu’était-il donc arrivé ?

Les paroles prononcées sont directement introduites dans le récit : il y a deux types de discours (ancré et coupé) qui cohabitent.

– Il permet de créer un « effet de réel » en reproduisant les paroles prononcées (accentué parfois par des marques d’oralité : déformations de mots J’sais pas, des répétitions, des hésitations je l’ai vu… il y a huit jours, ou peut-être quinze… des interjections Euh ! )
– il
dynamise la situation (effet de scène).
– il
révèle davantage le caractère et les sentiments du personnage.
– Il laisse plus de place à
différentes subjectivités
– Il met en oeuvre la f
orce de persuasion du dialogue (argumentation)

Discours direct sans verbe introducteur et ponctuation

Effet proche du discours direct + ambiguïté sur l’énonciateur (narrateur ou personnage)

2.2 Discours indirect

Il rôdait dans ce dédale, inquiet, se demandant ce que cela voulait dire, s’il était en prison, s’irritant, aspirant à l’air libre.

Il n’y a pas de décalage entre le récit (énoncé coupé) et les paroles qui font partie de l’énoncé ancré.

Il met à distance les paroles des personnages.

Il peut permettre d’introduire des doutes, des sous-entendus (Il dit que …), il permet donc de prendre des distances par rapport au locuteur dont les paroles sont rapportées.

2.3 Discours indirect libre

Il serait de retour, lui Ursus, avec Gwynplaine, tout cela n’étant qu’un malentendu. Ces recommandations faites, il partit.

Les paroles sont rapportées mais de façon discrète ou ambiguë.

On peut aussi remarquer la fluidité du récit dans ce cas.

Il permet de passer d’un énoncé coupé (souvent avec un narrateur externe, une focalisation omnisciente) à un énoncé ancré (une focalisation interne, un point de vue restreint sur une situation).
On ne sait pas toujours s’il s’agit d’une parole /
pensée d’un personnage ou d’un commentaire du narrateur → ambiguïté sur l’énonciateur, donc parfois le sens du commentaire.

On parle de superpositions de voix, ou encore, de polyphonie (car les voix se mêlent sans que l’une -celle du narrateur- ordonne ou organise visiblement l’autre)

2.4 Discours narrativisé

Gwynplaine, en ramassant un farthing tombé à terre … s’était mis à l’examiner et, en présence de l’hôtelier, avait tiré du contraste entre le farthing, représentant la misère du peuple, et l’empreinte représentant, sous la figure d’Anne, la magnificence parasite du trône, un propos mal sonnant. Ce propos, répété par maître Nicless, avait fait tant de chemin qu’il était parvenu à Ursus…

Il transforme les paroles en récit.
Les paroles sont résumées.

Le récit domine, il peut y avoir un effet d’accélération.
La voix des personnages peut être
« mise à distance ».

Les différences de niveaux de langue peuvent être effacées.
Ce qui ne peut être dit n’est pas dit. Ce qui peut
laisser supposer toutes les critiques…

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